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Faire face à la crise alimentaire et nutritionnelle de 2021

Faire face à la crise alimentaire et nutritionnelle de 2021

Face à la seconde année consécutive de crise alimentaire et nutritionnelle, le CILSS et le Secrétariat du Club, co-animateurs du RPCA, réactivent la Cellule technique du Réseau mise en place en avril 2020 ; cela inclut le dispositif de veille du Comité technique du Cadre harmonisé (CT-CH) chargé du suivi de la situation alimentaire dans les pays, ainsi que cette plateforme d’information. L’objectif est de : i) faciliter le partage d’information ; ii) favoriser une réponse rapide et de manière coordonnée face à l’urgence alimentaire et ; iii) susciter plus d’engagement politique en faveur d’alternatives durables face à la récurrence des crises et aux besoins croissants d’assistance alimentaire.

Situation alimentaire

Pour la 2e année consécutive, la région fait face à une crise alimentaire et nutritionnelle sans précédent. Les résultats des analyses du Cadre harmonisé indiquent que près de 27.1 millions de personnes, dont 12.8 millions au Nigéria, risquent d’être en situation d’insécurité alimentaire en juin-août, si des mesures appropriées ne sont pas prises. Environ 67 millions de personnes additionnelles, actuellement sous pression alimentaire (phase 2), pourraient basculer en situation de crise pendant cette soudure si des actions d’atténuation ne sont pas mises en œuvre.

Par ailleurs, les foyers d’insécurité alimentaire s’étendent de manière inquiétante au golfe de Guinée. Aux foyers récurrents du Liptako-Gourma, du bassin du Lac Tchad et au nord du Nigéria, s’est ajouté depuis deux ans celui du Golfe de Guinée. Ce dernier, provoqué par l’inflation, concerne notamment le Libéria et la Sierra Leone, avec respectivement 0.94 et 1.8 million de personnes qui pourraient être affectées par la crise pendant la soudure 2021. La Sierra Leone enregistre pour la deuxième année consécutive plus d’un million de personnes en crise alimentaire.

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Situation nutritionnelle

La situation nutritionnelle générale pourrait se dégrader davantage en 2021, avec la persistance de la crise sécuritaire, occasionnant la fermeture de centres de santé et d’écoles, privant les enfants de cantine scolaire.

En 2020, quatre pays de la région ont réalisé des enquêtes nutritionnelles SMART (Burkina Faso, Mali, Niger et Tchad). Le Burkina Faso et le Niger ont tous les deux enregistré une augmentation significative de la malnutrition aiguë. Les enquêtes au Mali et au Tchad ont été conduites après la période de soudure ; par conséquent, leurs résultats ne sont pas comparables aux autres pays étant donné que la situation nutritionnelle s’améliore généralement avec l’arrivée de nouvelles récoltes. L’inquiétude sur un recul de l’allaitement exclusif dû à la pandémie de Covid-19 ne s’est pas vérifiée.

La situation reste alarmante en 2021. Selon les estimations de l’UNICEF, quelque 9.6 millions d’enfants dans la région auront besoin d’un traitement contre la malnutrition aiguë. Cet effectif est inférieur aux estimations de l’année dernière (12.1 millions d’enfants) mais reste largement au-dessus de la moyenne des dernières années.

Au-delà des problèmes de malnutrition aiguë, la région reste confrontée au problème de retard de croissance, un indicateur clé de mesure des progrès vers l’objectif « faim zéro » (ODD2). Les populations souffrant de la malnutrition aiguë sont essentiellement les mêmes que celles touchées par un retard de croissance important (voir carte).

 

Situation pastorale

La situation pastorale est globalement marquée par une disponibilité satisfaisante en pâturages et points d’eau. Cependant, la soudure pastorale s’est prolongée en raison du retard d’installation de la biomasse herbacée en raison des perturbations pluviométriques. Plusieurs organisations pastorales telles que l’APESS ou le RBM mènent des activités de veille pour suivre la situation (dashboard). Les membres du dispositif PREGEC ont recommandé de renforcer les initiatives de production fourragère afin de maintenir les animaux le plus longtemps possible dans leurs terroirs d’attache.

La mobilité du cheptel demeure perturbée à cause des problèmes sécuritaires et l’accès aux ressources fourragères demeure toujours très limité dans les zones de conflit. Les mesures de santé publique face à la Covid-19 continuent d’entraver, voire de bloquer, la transhumance transfrontalière – près de 57 000 éleveurs avec un total de 1.5 million de têtes de bétail bloquées en janvier 2021 – affectant les moyens d’existence des éleveurs et des autres acteurs de l’économie pastorale. La perturbation de la transhumance transfrontalière en direction des pays côtiers (Bénin, Côte d’Ivoire, Ghana et Togo) entraîne de fortes concentrations et une surexploitation des ressources pastorales disponibles dans les zones accessibles ; cela augmente les risques zoo-sanitaires et de conflit entre agriculteurs et pasteurs.

Plans nationaux de réponse

En juin 2021, six pays sahéliens ont finalisé leurs plans nationaux de réponse (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal et Tchad) et étaient engagés dans leur mise en œuvre. D’autres pays bénéficient des plans de réponse humanitaire. Toutefois, la mobilisation du financement des plans de réponse demeure un problème récurrent. Seul le Tchad a déjà mobilisé près de la moitié des ressources nécessaires (45.6 %). En revanche, le Mali a à peine entamé la mobilisation des ressources domestiques (3.8 %). Sur le plan international, la situation ne se présente pas mieux : selon OCHA, seulement 15 % des besoins d’assistance humanitaire et alimentaire de la région de l’Afrique de l’Ouest et de l’Afrique centrale, sont couverts à la date de juin 2021. Ce taux est largement en-dessous du taux moyen (50 %) de réalisation des cinq dernières années.